vendredi 16 janvier 2009

Locaux scolaires

Tu ne connais pas mon lycée et comme lui d'autres établissements scolaires en France. Alors je vais t'en parler car pour la première fois de ma carrière, je suis particulièrement sensible à un environnement négatif. Serait-ce dû à un moment difficile de ma vie, à une usure du métier ou bien les choses se sont-elles tellement dégradées dans le lycée que j'ai atteint mon seuil de tolérance ? Ou bien les trois ?

Mon lycée est pourri, il a quelque chose comme 30 ans et est en cours de réhabilitation. Nous attendons des locaux neufs qui je l’espère ne seront pas vandalisés trop tôt.

Comment te raconter la vétusté des lieux qui ne peuvent même plus être réparés tellement ils tombent en ruine ?
Régulièrement en réunion, nous faisons le point sur les dysfonctionnements de notre lycée. Ils sont nombreux mais le pire est que ces dysfonctionnements sont les mêmes depuis des années.

Je vais commencer par le situer. Entre une zone résidentielle et une cité chaude, jusqu'à présent il était plutôt calme et on pouvait y travailler sereinement. Également cité scolaire il abrite d'un côté le lycée général et de l'autre le lycée professionnel. Le nombre de surveillants en baisse, la « vitalité » de certains élèves particulièrement débordante font que les heures de cours sont souvent dispensées dans le bruit qui provient des couloirs non surveillés de l’établissement. Je passerai sous silence les nombreuses fois où des individus ouvrent les portes des salles en plein cours, hurlent et se sauvent en courant.

Enseignant parfois dans les locaux de LP (lycée professionnel), j’ai même eu la surprise d'être interrompue par un jeune encagoulé qui a fait irruption dans ma classe en hurlant « Allah est grand » en arabe. Je l’ai poursuivi, mais il a réussi à m’échapper dans les dédales des lieux ; il faut dire que mon lycée est un vrai labyrinthe. Quand je suis revenue de cette course poursuite, mes étudiants de BTS, m’ont dit que j’avais été très imprudente, qu’il ne fallait surtout pas pourchasser les intrus parce que je risquais un mauvais coup. Naturellement je leur ai affirmé que je n’avais pas peur et que mon rôle était aussi de les protéger contre ce genre de nuisance.

Un autre jour dans les locaux du LG (lycée général) pendant un cours, une jeune fille de 1ère ES a ouvert la porte close de ma salle, brutalement. Cette fois Allah n’était pas dans le coup, elle a apostrophé une de mes élèves. Je me serais contentée d’une remontrance mais quand je l’ai interpellée elle s’est montrée agressive et irrespectueuse. Elle a donc été sanctionnée pour sa conduite. La conseillère d’éducation lui a consacré une pleine heure pour lui faire prendre conscience de ses actes. Je ne suis cependant pas convaincue qu’elle ait compris que les : « tu m’touches pas toi » et autres gentillesses qu’elle m’a adressés soient répréhensibles.

Des anecdotes comme celle-ci nous en avons tous, qui prouvent la difficulté des rapports dans une communauté d’ humains. Mais je suis persuadée que l’environnement a une grande influence sur le comportement des acteurs de cette communauté. Car moi aussi, aujourd’hui, j’ai du mal à supporter la crasse, le manque de lumière, de confort, le froid qui règne dans les classes, la dégradation des lieux. Mon lycée est aveugle et les couloirs sombres sans fenêtres. Les vitres brisées des fenêtres des salles sont souvent remplacées par des planches de bois, qui obligent à garder la lumière allumée en permanence. Le chauffage est asthmatique, les toilettes fuyantes et puantes et les portes coupe feu pleines, donc dangereuses car une personne ouvrant un peu fort la porte peut blesser celle qui se trouve de l’autre côté. C’est ce qui m’est arrivé ce matin. La porte s’est violemment ouverte sur moi, me blessant la main.

Mon lycée fut construit à une époque post soixante-huitarde où l'école devait être ouverte sur l'extérieur. D'où de nombreuses ouvertures rendant impossible tout contrôle des entrées et sorties des élèves et des visiteurs malintentionnés. Pour preuve les nombreuses dégradations, vols de matériel audio-visuels et informatique. Une bombe artisanale a même explosé il y quelques années ne faisant heureusement que des dégâts matériels mais qui aurait pu tuer.

Et même si des travaux sont entrepris, de ci de là, mon lycée est tellement vieux que je crains que nous ne puissions plus rien pour lui.
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2 commentaires:

Anonyme a dit…

Courage Marie-Laure, dans deux ans tu auras un lycée tout neuf, du matériel dernier cri, des portes que l'on ne pourra pas ouvrir de l'extérieur .....et des élèves respectueux, enthousiastes, volontaires...
CR

Marie Laure a dit…

Chère CR,
Bien sûr que nous aurons nous aussi notre coin de ciel bleu, nous le valons bien, n'est-ce pas?

En attendant nous faisons avec, mais combien d'entre nous, personnel et élèves y compris vivent cela au quotidien sans espoir de changement? C'est à eux que je pense et je ne peux m'empêcher de leur conseiller d'essayer de faire comme j'ai fait pendant des années : garder ce coin de bleu dans la tête et continuer à avancer en se concentrant sur l'humain.