vendredi 27 février 2009

Correction des copies- du côté des profs

Ce billet fait suite au premier et deuxième billets sur la question

Me voici installée à mon bureau, celui en acajou donné par mon beau père, la tablette de chocolat à proximité, le crayon à la main et les copies devant moi.
J’ai d’emblée éteint l’ordinateur, rangé le casque qui me permet de converser avec des amis du bout du monde sur Skype et disposé les corrections et barèmes imprimés issus de mes dossiers virtuels, prête à officier.

Ce rituel m’est obligatoire si je veux être efficace car je déteste corriger mes copies.

Mais quel enseignant un peu expérimenté aime corriger des copies ? Il n'y qu'à écouter ce qui se dit dans les salles des profs à ce propos pour comprendre que personne n'aime le faire.

En ce qui me concerne je vois plusieurs raisons à cela.


Je sais déjà que j’ai trois, quatre paquets de 35 copies et que le temps que je vais devoir consacrer à les corriger sera important.
De plus c’est un travail solitaire qui nécessite chez moi une concentration de tous les instants et me prive du lien que j’entretiens avec les autres au travers de ma messagerie et d’Internet. Je sais aussi que je ne pourrai pas sortir l’esprit tranquille et que je devrai rester confinée chez moi. L'activation spontanée du rôle de Coach ( C ) qui est le trait principal de ma personnalité fait que je refuse d’être coupée des autres trop longtemps surtout quand la tâche à accomplir ne satisfait pas mes besoins, de lien et de grand air.

Je dois donc configurer mon mental de façon à développer mon rôle de Leader (L) pour anticiper les avantages pour mes élèves et pour moi de ces corrections. Enfin je dois activer mon rôle de Manager pour me confronter à la cruelle réalité, puisqu’elle me cloue chez moi mais constitue une partie du travail pour lequel je suis rémunérée.

Mais ce n’est pas la seule raison à mon maque d’envie de m’y coller.


Il semble que si j’ai du mal à m’y mettre c’est parce que l’image que j’ai du contenu des copies de mes élèves est négative. C’est comme si je savais à l’avance que j’allais trouver de quoi être contrariée, déçue, en colère, comme si elles n’allaient déclencher que des émotions négatives en moi.

Il serait intéressant de se demander pourquoi.

Plusieurs réponses sont possibles qui correspondent à plusieurs attitudes.

L’image négative que certains enseignants ont du contenu des copies de leurs élèves est extérieure à eux. Ils pensent que leurs élèves sont incapables de bien faire parce qu’ils sont « nuls » et qu’ils le resteront toujours. Pour eux leurs élèves s’ingénient à ne pas suivre leurs précieux conseils, à ne pas assimiler les cours qu’ils dispensent et tout ceci ne provoque que frustration, colère, découragement et abandon chez ces profs. Ils sont persuadés qu’il n’y a rien à faire, que la cause est perdue.

Ces enseignants ignorent les rôles de guide, de Leader (L) qu'ils peuvent jouer auprès de leurs élèves. Ils mésestiment leur pouvoir à les influencer dans le bon sens, dans le sens de la réussite. Ils ne voient pas l’espace privilégié que représente une copie d’élèves en termes de communication. Ils ne comprennent pas l’opportunité qu’elle leur donne de s’adresser à leurs élèves individuellement. Ce sont souvent les mêmes qui clament qu’ils ne sont pas là pour se faire aimer de leurs élèves, ignorant ainsi l’importance de la relation « affective » que certains élèves recherchent.

Ma réaction est différente.
Mais l’est-elle au fond ?
La peur d’être déçue de la performance de mes élèves est sans doute ce qui me freine pour corriger mes copies. La prestation donnée étant souvent le reflet de ce que j’ai enseigné en amont, concevrais-je une angoisse d’avoir mal enseigné ? Peut-être. Porterais-je en moi la responsabilité de chaque faute, chaque erreur, chaque manquement, chaque incompréhension de mes élèves et craindre de les voir écrits sur leurs copies, signifierait-il que je suis persuadée qu’ eux comme moi sont incapables de progresser ?

Dans ce cas effectivement corriger mes élèves prend un sens négatif puisque les deux exercices, le devoir comme sa correction seraient alors l’expression de nos incompétences notoires et surtout indélébiles.

Ne rien tirer de ce constat nous fige, les élèves et moi dans un rôle de victimes, consentantes et statiques.

Si la correction d’un devoir n'est vécue par l’élève et par le prof que comme la sanction d’un savoir non assimilé, d’un savoir-faire non acquis, elle ne sert à rien.

Combien d’élèves, soucieux de connaître la note attribuée à leurs performances se contentent de ranger ou de jeter leurs copies aussitôt après avoir pris connaissance de cette dernière ? Combien de professeurs après un discours général sur la qualité des devoirs, s’arrêtent-ils à la remise des copies. Combien de professeurs se contentent de donner une note chiffrée au devoir sans explication ni conseils pour progresser.

Dans ce cas, oui, la note est la sanction, l’évaluation de la prestation, bonne, moyenne ou mauvaise, un résultat d’examen. D’ailleurs dans les examens et concours, les copies ne sont jamais rendues au candidat. Alors pourquoi rendre les copies si elles ne servent que d’évaluations chiffrées ? La note suffirait.

Si je veux que la correction de mes copies soit utile et agréable,je dois donc configurer mon mental de façon à développer mon rôle de Leader (L) pour anticiper les avantages pour mes élèves et pour moi de ces corrections. Je dois aussi activer mon rôle de Manager pour me confronter à la réalité, puisqu’elle me cloue chez moi mais constitue une partie du travail pour lequel je suis rémunérée.

Il me faut donc changer l’image du contenu des copies de mes élèves pour m’installer avec enthousiasme à mon bureau. Je dois leur témoigner une confiance en leur capacité de me surprendre, de m'étonner, de me séduire et surtout de réussir. Je dis souvent à mes élèves que j’ai besoin qu’ils m’épatent, m’amusent, me séduisent par leurs écrits. J'ajoute aussi qu’ils n'oublient jamais que tout travail écrit a vocation d'être lu par un correcteur. Il convient donc de les soigner, le travail et le correcteur.

Si je ne supporte pas de rester clouée chez moi, seule, pourquoi ne pas essayer des lieux plus conviviaux pour corriger mes copies? Une terrasse de café, la table de la salle à manger, la cuisine, la chambre de ma fille peuvent aussi faire l'affaire.

Si j'investis un autre espace pour corriger mes copies, si j'adopte une image positive de leurs contenus, alors je pourrai prendre conscience de mon pouvoir de faire progresser mes élèves par cet acte.
Corriger deviendra un plaisir, stimulé par l'anticipation de la découverte des talents de mes élèves.
Share/Save/Bookmark


jeudi 26 février 2009

Correction des copies - Introduction à LMCP

Ce billet est la suite du premier billet consacré à la correction des copies.

Tandis que je poursuis, le plus sereinement possible, les corrections auxquelles je me suis engagée, je me vois rédiger la suite de « correction des copies » à la lumière du développement continu de la performance, P=LMC de la Méthode Chalude de la Performance.

Monsieur Chalude, le créateur de ce système, définit la Performance (P) comme le produit des 3 rôles présents en chacun de nous:

- L, pour Leader, qui représente le pouvoir d'aller de l'avant
- M, pour Manager, qui correspond à la réalité, à la situation concrète
- C, pour Coach, qui touche à la personne et à la relation humaine


Pour lui, toujours veiller à nous situer dans ce système dynamique positif nous garantit la réussite de ce que nous entreprenons : trois rôles et six vecteurs qui relient ces rôles positifs nous entraînent dans une spirale positive.

Dessiner les trois lettres et les six flèches vont m’encourager à rechercher le sens, à réfléchir aux options et à rencontrer les besoins des élèves comme ceux des enseignants. Justement quel est le sens des corrections que nous faisons du travail de nos élèves ? A quoi cela leur sert-il ?
Qui d’entre nous n’ a pas un jour vu du coin de l’œil un élève, mécontent de sa note, froisser le contrôle qu’il venait de lui rendre et sur lequel il avait passé son précieux temps pour le jeter à la poubelle.

Provoc ou dépit ?

La première des questions que nous nous posons tous, enseignants et élèves est la suivante : à quoi ça sert ?
Pour l’élève
Pour l’enseignant
Mais avant de répondre à la question essentielle à quoi ça sert il faut distinguer trois types d'attitudes face à la correction.

Typologie LMC des correcteurs

Les différentes attitudes dont nous faisons montre pour la correction de nos copies correspondent aux différents types de personnalités.

Il y a les Leaders qui s’organisent tellement bien qu’ils ont programmé les contrôles et devoirs de leurs élèves de façon à ne rien avoir à corriger pendant leurs congés et partent, l’esprit et le cartable vides, faire du ski en Bretagne ou de la voile à la montagne.

Puis il y a les Managers qui ont planifié tous les contrôles de toutes leurs classes et qui savent qu’ils consacreront deux heures par jour à la correction du devoir de la 2nde 12 et que 2 multiplié par 6 jours égal les 12 heures pile poil nécessaires à la correction.

Et enfin il y a les Coach, ceux qui n’ont pas pu faire autrement que de donner une interro avant les vacances parce que Yohann de 1ère S1 a levé la main et demandé que la dernière leçon soit testée et qu’ils ont pensé qu’il fallait le faire parce que Yohann le désirait.

Les Leaders seront tranquilles, les Managers organisés et les Coach complètement stressés et dans l’agitation pendant toutes leurs vacances.

Les Manager mettront tout en œuvre pour accomplir leur tâche pendant la première semaine et partiront faire du ski en Bretagne ou de la voile à la montagne pendant la deuxième semaine.

Les Coach auront des tas de copies la veille des vacances et partiront la valise pleine, avec l’intention de les corriger là-bas, en Égypte ou au Vietnam, entre deux excursions organisées par la la NOUVELLE FRAM ou chez leurs beaux parents en Normandie quand ces derniers aéreront les enfants entre deux averses. Ils reviendront avec leur fardeau, intact et vierge de toute remarque ou note. Il ne leur restera alors plus qu’une semaine et chaque jour sera vécu dans l’angoisse qui tour à tour les paralysera ou les agitera parce qu’ils seront tellement dispersés qu’ils auront l’impression de ne rien faire.

Les Manager qui ont tout planifié remettront les copies à leurs élèves à la date qu’ils ont prévue au retour des vacances et les Coach qui n’ont pas pu s’empêcher de tester une fois de plus les apprentissages de leurs élèves le feront peut-être aussi mais à quel prix.

Dans tous les cas les deux auront vécu cette activité comme une contrainte. Les Managers l’auront évacuée rapidement et sans états d’âme. Les autres qui remettront toujours au lendemain jusqu’au dernier moment- qui sera généralement la veille de la date butoir qu’ils se sont fixée, et qu’ils auront repoussée plus d’une fois-, auront vécu mille tortures avant d’achever ce travail.

Mais ce qui est sûr c’est que tous savent qu’il leur faudra recommencer, dans la douleur ou dans l’acceptation, dans l’agitation ou dans le calme.
Alors, merveilleux Sisyphe de l’Enseignement tous accompliront leur mission certains sans broncher et d’autres en râlant.
Share/Save/Bookmark


mercredi 25 février 2009

Un nouveau mobilier pour nos élèves ?

Et s'il fallait que nous changions le mobilier des salles de classe pour que nos élèves puissent trouver la position idéale pour être plus attentifs?

Voici ce que je lis dans le New York Times et qui vaut la peine que l'on s'y arrête.

Dans une école primaire du Minnesota, USA, un professeur des écoles a conçu, fait financer et installer pour la deuxième année consécutive, dans sa classe de nouveaux sièges "assis-debout" avec leurs bureaux assortis à l’usage de ses jeunes élèves.

Le principe est simple : il s'agit pour l'élève de choisir sa position de confort pendant les cours, position qui peut varier. Il peut se tenir debout, utiliser le repose pied ou rester assis s'il le désire .

L'installation de ces nouveaux bureaux et de leurs sièges a pour origine le constat par cette enseignante que la liberté de ses élèves en matière de posture les rend plus attentifs. Elle se base aussi sur les travaux du Docteur en médecine James Levine, chercheur de la clinique Mayo.

Ce nouvel aménagement fait l'objet d’une expérience dans plusieurs écoles du coin et séduit de plus en plus d’écoles dans le pays.

En effet une autre enseignante déclare que depuis que ce nouveau mobilier a été adopté dans sa classe, aucun élève ne se tient la tête penchée sur son bureau comme cela pouvait être le cas avec des bureaux traditionnels. Au contraire, dit-elle, ils sont tout le temps en éveil. Elle ajoute que pour elle aussi les positions de ses élèves rendent confortables ses interventions auprès d'eux puisqu'elle ne doit plus se pencher pour lire leurs travaux.

Pour les spécialistes de l’éducation, les avantages pour l’élève d’une telle innovation sont doubles. D’une part ne plus avoir à s'appliquer à ne pas remuer en classe permet à l’élève de mieux se concentrer sur son travail, d’autre part pouvoir bouger à sa table de travail lui permet de lutter contre l’obésité et pallier la diminution du temps de récréation accordée aux élèves.

Pour l’instant les résultats de cette expérience ne sont pas encore publiés et si elle a des détracteurs, elle fait l'unanimité des spécialistes de l’enseignement comme des autres, pour preuve les réactions trouvées sur le forum proposé après l’article daté du 24 février 2009.
Share/Save/Bookmark


mardi 17 février 2009

Correction des copies

Sisyphe faisant rouler son rocher.

C’est le premier jour des vacances de printemps. Me voici installée à mon bureau (acajou, récupéré dans le grenier de mon beau-père). Comme toutes les vacances scolaires, exceptées celles de fin d’année, je dois effectuer mon pensum : la correction des copies. C’est notre lot, à nous enseignants, de ne jamais vraiment déconnecter pendant nos congés. En plaisantant, à ceux qui me demandent avec ironie si je suis en vacances ou en grève, je réponds que je ne suis jamais en vacances mais au chômage technique. Enseigner dans une salle de classe vide ne rime à rien. Pas d’élève égale absence de travail sur site, dirais-je, mais n’empêche pas le labeur continuel, dans la tête et à la maison.

Souvent pour de longues heures, ponctuées de bouffées de cigarettes pour les uns, de gavage de chocolat pour les autres, l’enseignant corrige des copies. « Que de ratures, c’est illisible, je serai bon prince, … ?...., il ne progresse décidément pas, quelle confusion ! ….» se dit-il.

Tandis que les copies s’ornent de multiples traits tracés au crayon, les questions se bousculent en moi : pourquoi tant de fautes ? Mon enseignement est-il si mauvais ? Pourquoi ce pensum ? Mes corrections vont-elles être utiles ? Pourquoi dois-je passer mes vacances à corriger les erreurs des autres ? N’est-ce pas aux élèves à assumer le résultat de leur travail ? »…

Bondissant de copies en copies, je suis surprise par les élèves au regard vengeur :

Elève: j'ai passé trois heures pour faire ton devoir!
Professeur : et qu'en as-tu tiré?
Elève: j'ai pas pu sortir avec mes copains, j'ai pas pu jouer en ligne à mon jeu préféré. Comme je te déteste de me donner tous ces devoirs!
Professeur: Mais c'est pour ton bien. Qu'en as-tu tiré d'autre? N'es-tu pas fier d'avoir accompli ce travail de bout en bout?
Elève: Si, c'est vrai. J'en suis fier. Et en plus j'ai appris plein de trucs.
Professeur: Tu vois, moi aussi je suis fier de toi.


Me traînant de copies en copies, les élèves me surprennent la bouche pleine de chocolat :

Professeur: Zut alors, je vais encore passer toutes mes vacances sur ces satanés devoirs
Elève: mais pourquoi tu nous les donnes alors? Qu'est-ce que ça t'apporte?
Professeur: c'est pour moi une façon de voir si je vous ai bien fait assimiler certaines choses.
Elève: alors quand on réussit, t'es fier de toi?
Professeur: mais oui bien sûr, et je suis fier de vous aussi quand j'ai la preuve de vos progrès.
Elève: alors, arrête de râler!
Share/Save/Bookmark


samedi 14 février 2009

Richard Descoings et la Réforme des Lycées

Richard Descoings va peut-être venir dans notre lycée courant Mars. Je tiens l'info d'un de nos représentants au Conseil d'Administration qui la tient de notre Directeur Adjoint. C'est une visite qu'il a annoncé rendre à un lycée par département et s'il nous choisit, nous qui sommes Lycée Ambition Réussite, nous pourrons alors l'interroger sur la réforme des lycées, dont je vous le rappelle notre ministre Monsieur Darcos l'a chargé de s'occuper.

Mais ce n'est pas tout. Lors d'une réunion à Sciences Po à laquelle j'assistai avec ma collègue, je l'ai entendu dire qu'au cours de ces visites, il allait consulter la base. Nous pourrons donc également lui transmettre nos idées. Car cette visite prendrait la forme d'une conférence-débat de deux ou trois heures.

En conséquence, nous allons nous préparer pour que l'entrevue soit constructive. Parmi les questions que certains d'entre nous souhaitent aborder en voici quelques unes avancées par mon collègue représentant au CA que je livre telles quelles :

Quelle est notre vision de la mission du lycée?
Quel rôle pour le bac?
Qu'est-ce qui marche dans nos différents projets, dans nos différentes pratiques?
Qu'y avait-il de positif dans le projet de réforme? ( le projet n'ayant pas du tout été retiré, je devrais dire "qu'y a-t-il...")
Qu'est-ce qu'il y a de nocif / dangereux / d'effets pervers...?
Quel est son rôle à lui: recueillir et synthétiser les propositions de la "base" ou "mieux nous expliquer" le projet (nous avions mal compris...)?
Ma dernière formulation est là volontairement polémique car on ne peut faire abstraction du contexte, de la politique générale et s'en tenir à de grandes idées sur lesquelles le consensus est facile.


Si cette réunion doit avoir lieu, nous avons convenu avec la direction de banaliser une après-midi environ une semaine avant pour déjà échanger nos idées et positions. Et cela pourrait intervenir dès début mars.
Share/Save/Bookmark


mercredi 4 février 2009

COMPORTEMENT D'ELEVE : LA TENTATIVE DE FRAUDE

Sonia élève de Seconde, âgée de 15-16 ans, bien élevée, bien dans sa peau, bonne élève, s’est faite attraper avec une anti-sèche en cours de physique.

Voilà en substance la teneur de l’émail que je reçois sur ma messagerie électronique, avec pour objet : « Juste pour vous informer ». Il émane de la professeure de physique et a pour destinataires tous les professeurs de la classe.

C’est de cette façon que nous nous mettons au courant des bons résultats, bonnes actions, problèmes et absences de nos élèves et que nous échangeons sur tout ce qui fait la vie de notre classe de Seconde.

C’est bien pratique et très important.

Et c'est comme cela que j'apprends que Sonia s’est faite pincée, hier.

En fait, il ne s’agit pas d’une anti-sèche mais de la feuille du cours qui fait l’objet du présent contrôle. Sonia a copié sur son propre cours. La professeure le précise et regrette qu’elle n’ait même pas pris le temps de fabriquer une anti-sèche. Il est vrai que fabriquer ce « pense-bête illégal » permet de se familiariser avec le cours, d’exercer son esprit critique en sélectionnant les notions, ainsi que son imagination en lui trouvant la forme la plus ingénieuse, celle qui permet de ne pas se faire attraper.

Elle est donc déçue que Sonia n’en ait rien fait.

Quelle banalité, quel manque de fantaisie d’avoir sa feuille de cours sur les genoux. Quand certains font de l’anti-sèche un art, qu’ils exercent avec créativité, notre téméraire élève use de la feuille grand format avec calculs et notions dictés en classe. Quelle platitude, quelle déception !

Mais suffit, je ne ferai pas l’apologie de la fraude scolaire, ce n’est pas mon rôle. Reprenons plutôt notre récit.

Après nous avoir informé, notre collègue de physique conclut son email par une mise en garde car, écrit-elle, si Sonia tente « de le faire » en physique, elle pourrait « le faire » dans les autres matières.

Franchement, après sa lecture, je n'accorde pas beaucoup d'attention à cette affaire, car je me dis que la professeur l'aura gérée comme il se doit. Cependant, comme il me paraît important que nos élèves sachent que nous sommes une équipe soudée et que nous sommes avertis de leurs méfaits comme de leurs bonnes actions,il me semble donc tout à fait naturel, alors que je suis près de notre élève pour vérifier la justesse d’un exercice d’application, de lui glisser un sous entendu qu’elle comprend aussitôt. Cette compréhension immédiate prouve bien qu’elle n’est pas coutumière de la tentative de fraude. C’est sans doute pour cela qu’elle s’est faite pincer, la pauvre !

Bon voilà encore que je réagis comme une ancienne élève, pour qui copier n’est pas frauder!

J'aurais probablement oublié cet incident si je n'avais pas rencontré ma collègue dans la salle des profs le lendemain matin qui me raconte de nouveau l'histoire, cette fois de vive voix. Elle la termine en me faisant part de la sanction qu'elle a infligée à Sonia : un zéro au contrôle. Un zéro sur vingt comme réponse à cette tentative de fraude, rien d'autre. Je suis d'emblée très gênée par cette réponse qui me paraît inadéquate pour une tentative de fraude. Une note quantifie la qualité d'une prestation. Un zéro signifie que la prestation est nulle, car inexistante ou erronée. Sonia ne pouvait pas rendre un contrôle nul. En quoi son zéro est-il indicateur de sa prestation? En quoi sanctionne-t-il la fraude?

Fraude, ce mot résonne comme une malhonnêteté, une tricherie, une tromperie, une escroquerie à mes oreilles et à celles des honnêtes gens. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle je le préfère à l’expression : « le faire » de l’émail ou au mot tricherie, plus volontiers employé dans le contexte scolaire.

Non, moi je veux que l’on bannisse le mot tricherie qui minimise l’action, la banalise, l’infantilise. Tricher n’est pas jouer, na na na !
Non, moi je veux réhabiliter le mot fraude dans les classes. Toi élève tu ne triches pas, tu fraudes. Tu n’es pas un sale tricheur, tu es un fraudeur ! C’est plus grave. Tu peux aller en prison pour cela ! Pas en prison de quelque jeu vidéo pour ados, non en vrai prison, avec des cellules et des barreaux aux fenêtres !

Bien sur, je délire, j’exagère, j'extrapole. Je ne veux certes pas que même s’il leur arrive d’être fraudeurs nos chers élèves soient enfermés, bannis de l’école, mis au ban de la société. Ils sont si jeunes. Ils ont tellement à apprendre.

Et justement nous sommes là pour ça.
Share/Save/Bookmark


lundi 2 février 2009

Conseils de discipline - Une réponse à l'absentéisme ?

Il a neigé cette nuit.

Naïvement je ne pense même pas que mes étudiants ne pourront pas se rendre au lycée. Les autobus ne roulent pas quand il neige dans la région parisienne.

Heureusement que la prof principal m'appelle chez moi, poussée par nos étudiants de 1ère année de BTS Assistant de Gestion PME-PMI. En effet ces derniers lui demandent de me joindre pour savoir si j'assure mon cours avec eux ou pas. Je vais, c’est sûr, en décevoir quelques uns puisque je réponds que je serai fidèle au poste. Je suis sincèrement désolée pour les sérieux qui n’auraient pas craché sur mon absence, je sais ce que c’est j’ai été élève ! Mais j'espère pouvoir me rendre au lycée avec mon 4x4.

Je ne vois pas pourquoi je manquerai mes cours et je suis curieuse de voir l'impact qu'à eu la décision que l'équipe pédagogique et la direction ont prise conjointement à l'encontre de nos absentéistes. Lors du conseil de classe semestriel, devant une seule déléguée, elle-même absentéiste, et le très petit nombre d'étudiants qui souhaitaient assister à l'étude de leur cas, nous avons prononcé treize conseils de discipline pour les plus absents et les plus paresseux. Cette décision a fait des vagues aussi bien auprès de nos collègues syndiqués ou non dans notre salle des profs qu’auprès du Recteur d'Académie. Il est vrai qu'un tel sursaut n'est pas politiquement correct, sans doute parce que l'on ne retient que le côté sanction du conseil de discipline et non pas ses vertus pédagogiques. A l'heure où j'écris je n’en connais pas l'issue.

Avant les dits conseils, notre proviseur a reçu ces jeunes gens. Il nous a ensuite réuni pour nous faire part des décisions et des justifications de ces étudiants. En effet traditionnellement, les étudiants préfèrent démissionner avant de passer en conseil de discipline et c’est tout le sens de ces entrevues. De plus elles permettent aussi d’avoir enfin un contact avec ceux que l'on ne voit jamais, car généralement ils se déplacent pour cette occasion.

Notre proviseur nous informe donc que tous ont décidé de continuer leur année même s'ils n'avaient pas choisi ce BTS au départ. Certains affirment même que finalement il ne leur déplaît pas.

Les problèmes personnels, criants, véritables ou exagérés, le manque d'argent qui les oblige à travailler parfois vingt heures à l'extérieur pour d'autres, nous renvoient en pleine face la dure réalité de la vie d'une partie de nos étudiants. L'énorme fossé qui existe entre leur scolarité précédente en Bac Professionnel ou Technologique et les exigences de ce BTS nous interpellent et nous questionnent aussi.

Certains se disent déprimés.


Déjà pendant le conseil de classe nous avions soulevé beaucoup de questions :

· Comment faire comprendre au Rectorat que les affectations des élèves en BTS, doivent prendre en compte la réalité des étudiants, leurs goûts et leurs envies ?

· Comment mieux faire connaître notre formation pour y attirer plus d’ étudiants susceptibles de réussir pour ainsi contribuer à insuffler un meilleur climat de travail ?

· Comment aider nos étudiants à avoir une plus grande estime d’eux-mêmes pour une meilleure réussite ?

· Comment traiter l’absentéisme au lycée ? Pour les élèves, pour les étudiants, sachant que les universités ont apporté une réponse en sanctionnant les absences ?

· Comment nous les enseignants, mieux connaître le niveau et les besoins de nos étudiants pour nous y adapter, sachant qu’ils sont très hétérogènes, et les entraîner dans une spirale de réussite ?

· Comment traiter l’hétérogénéité de nos étudiants ?

· Comment aider les professeurs à enseigner dans ces classes ?

Il me semble indispensable d’ apporter des réponses concrètes à ces questions qui sont centrées sur trois pôles
1. Le recrutement des étudiants
2. Les étudiants
3. Les enseignants

Je ne pourrai qu'essayer des réponses sur les deux derniers pôles, le premier m'échappant complètement.

C’est ce que je ferai grâce à mon expérience et ma pratique de LMCP dans un prochain billet.
Share/Save/Bookmark